Couverture du journal du 06/04/2024 Le nouveau magazine

Un langage pour les autistes

Sur la côte sud des Landes, Leila Gamane a créé Handily pour diffuser la méthode Saccade qui permet aux personnes autistes d’accéder à l’information, la communication et la perception des émotions. Une révolution dans la prise en charge de ces troubles du neuro-développement ?

Pour les non-voyants, on a le braille… Le langage conceptuel de la méthode Saccade pourrait devenir celui des autistes », espère Leila Gamane. En créant Handily pour le développer dans les Landes, la maman d’Ilan, 18 ans, atteint du trouble du spectre de l’autisme (TSA), est bien décidée à continuer à « enfoncer les portes pour aider un maximum de personnes qui n’ont pas les clés. Face à l’autisme on est encore trop souvent dans l’incompréhension. Je me suis toujours dit qu’il fallait faire plus », témoigne-t-elle. Formée en 2006 à l’analyse appliquée du comportement (ABA), elle est intervenue pendant plusieurs années à domicile et dans des structures spécialisées, en parallèle de son travail dans l’immobilier. En lien avec des chercheurs internationaux, elle découvre et se forme il y a un an à la méthode Saccade, mise au point au Québec par Lise Saint-Charles, spécialiste du TSA et Brigitte Harrison, elle-même autiste. « Elles sont parties de tous les écrits produits par des autistes sur 70 ans et Brigitte Harrisson a pu décrire de l’intérieur ce qui se passe, en donner le sens et la signification. Ensemble, elles ont élaboré un langage pour entrer en communication avec les autistes. Là où les méthodes courantes cherchent à faciliter leur adaptation à l’environnement, la méthode Saccade ne vise pas seulement à pallier les déficits, mais à donner l’accès à l’information, à la communication et à la perception des émotions ». 

LEUR DONNER LA PAROLE

La démarche débute par la définition du profil autistique précis de chacun. « Puis, il suffit d’un papier, d’un crayon et d’une communication adaptée avec un minimum de mots », résume-t-elle. L’objectif de la dizaine de graphismes élaborés par les chercheuses canadiennes : aider, sur le mode ludique, à développer telle ou telle fonction cognitive et de nouvelles compétences. « Ces dessins permettent de capter l’attention pour stocker l’information et la restituer plus rapidement. Et au final de disposer de plus d’outils pour mieux saisir les notions abstraites que leur cerveau a du mal à intégrer et mieux gérer leur perception des couleurs, des sons, des contacts… Bref, d’un monde qui les agresse ». Les témoignages de parents se multiplient pour confirmer que le langage conceptuel contribue à diminuer les troubles de l’anxiété et permet à l’enfant de devenir plus spontané. « On leur donne la parole, la possibilité d’exprimer leurs propres choix et leur propre ressenti. Et ça change tout », résume Leïla Gamane. Et si aucune recherche ne l’atteste encore, la méthode opèrerait aussi auprès des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. 

Handily.libre@gmail.com